Les Assoces ont-elles un avenir?

Publié le par Spacky

Les assoces ont-elles un avenir ?

 

 

 

L’étrange scrutin CROUS de la semaine du 13 mars 2006 a donné lieu a une situation sans précédent dans le paysage des organisations représentatives étudiantes. Pour la première fois en effet, la Fage, qui représente l’héritage de l’engagement étudiant à l’origine des œuvres universitaires (Restos U, logements, sécurité sociale étudiante) devance son vieil adversaire politique.

 

 

 

Pour beaucoup d’associatifs, ce résultat est l’aboutissement de presque vingt ans d’efforts pour faire reconnaître l’intérêt et la valeur de l’engagement non partisan dans la cogestion du service public d’enseignement supérieur. Pour certains, il s’agit d’une consécration.

 

 

 

Cependant, le mérite majeur des associations étudiantes, notamment face aux théologies syndicales, n’a jamais été que celui d’apporter un discours innovant, créatif, original et non orienté politiquement (plus facile à appliquer à l’intérieur d’un service public). Ainsi, lors des événements liés au CPE, sans participer à la course à la médiatisation (on a vu certain président de syndicat étudiant passer sur des émissions people de Canal +), la Fage a donné au gouvernement un message clair « le CPE est inacceptable, négocions une sortie de crise », ce à quoi les quelques étudiants qui purent braver le climat délétère entretenu par les extrémistes étudiants (qui ne sont qu’une forme moderne et désespérée de fascistes rouges ou bruns) ont largement adhéré en votant Fage. Ainsi, la Fédé des associations étudiantes a respecté un de ses objectifs majeurs : crédibiliser la parole étudiante, et notamment le rôle des élus étudiants, en faisant de sa participation aux négociations un point essentiel du fonctionnement de l’institution, mettant à défaut les tenants du boycott et du pourrissement.

 

 

 

Il y a donc un risque, pour autant que le point faible de toute chose réside précisément en ses points forts. Certains vieux militants associatifs souffrent d’un mal trop négligé et qui peut à terme facilité le retour des partisans de l’immobilisme actif : la satisfaction. Ce même sentiment pervers qui met un terme aux élans intimes les plus fougueux peut définitivement faire disparaître le mojo des associatifs. Lorsqu’on gère des activités, comme c’est le cas ici, chaque activité connaît, schématiquement, un cycle de vie. Lors du lancement de l’activité, pour une association, il faut réunir beaucoup de ressources, du bénévolat, des dons et des subventions, pour développer quelque chose qui ne suscite qu’un faible intérêt du public, donc peu de fréquentation, d’adhésion, de votes, etc.… Arrive un deuxième age, si l’activité et l’association survivent, où un début de succès permet à l’activité de se suffire à elle-même : les entrées couvrent les dépenses, les cotisations financent les courriers, et ainsi de suite. Le troisième âge, que l’on cherche à atteindre le plus rapidement possible, et à faire perdurer le plus longtemps, est celui de la vache à lait : c’est par exemple la cafétéria pleine d’habitués qui finance les publications gratuites, les sorties, les événements,, les formations diverses. Malheureusement, il est un fait inévitable, toute activité est vouée à disparaître, parfois au profit d’un service plus adapté (prix, accessibilité, plus souvent que contenu). Cela est vrai pour tout ce qui fait le succès actuel de la Fage et de ses affiliés. Le sentiment de triomphe peut faire oublier à certains associatifs l’urgence que représente le lancement d’idées nouvelles. En 2006, les défis à relever sont pourtant nombreux : d’un système de sécurité social plus juste, avec une cogestion plus démocratique (note), à la mise en place de réseaux de solidarité, notamment pour les étudiants internationaux, le renforcement du rôle et de la parole de l’élu étudiant, l’accès au contrôle de gestion, le droit à consultation en matière d’éducation supérieure et d’orientation, l’aide à l’accès au droit pour les étudiants, l’égalité des sexes et des préférences sexuelles, l’égalité face aux origines culturelles, sociales et nationales, la prise en compte de la dimension sanitaire de la perception réciproque des étudiants et de leur société civile (pour ne pas dire « faire cesser le harcèlement social institutionnalisé »), et j’en passe. Il existe suffisamment de chantiers d’importance concernant la politique étudiante et universitaire pour justifier l’exigence d’un renouvellement des engagements de nos responsables associatifs nationaux, mais aussi pour que chaque militant ait un rôle important à jouer, sans compter les innombrables activités culturelles, sociales, ludiques qui ont un rôle primordial dans l’activation permanente du lien social parmi les étudiants et avec la société. L’heure est moins que jamais aux Te Deum et aux auto-congratulations. Les circonstances nous ont fait lancer un défi cinglant à la face des organisations de la vieille école, et il serait plus que judicieux de ne pas nous laisser dépasser par ces enjeux.

 

 

 

La question se pose pourtant de savoir si nos cadres ont encore de l’appétit. En effet, les chaleurs estivales, bien que passagères, semblent avoir porté un coup difficile à nos élites vieillissantes. Les communiqués de la Fage se font lapidaires si non approximatifs. L’ARE, qui surgit d’abord tel un cri de victoire, peut-elle réellement s’essouffler ? Alors que ce premier champ de bataille, le terrain électoral, est devenu pour les associatifs un lieu de victoire, il est temps pour la Fage et ses militants d’investir le suivant en faisant appel à ses troupes fraîches, qui sont armées de mille idées nouvelles.

 

 

 

Rappelons enfin, aux dinosaures qui voudraient douter confortablement de l’opportunité de leur remplacement, que le pire moment pour changer les choses, c’est quand tout va mal. Le début de réussite que représente 2006 doit fournir l’élan permettant un rapprochement de la structure associative des attentes des étudiants, et ne pas finir dans le vide que pourrait tendre à créer le souvenir de nos capitaines. Gardons à l’esprit le triste destin de PDE, et ne la suivons pas dans cette amère conclusion.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article