Foot et politique, une alliance à sens unique.

Publié le par Spacky

Devinette. Quel genre d’individu n’hésite pas à récupérer tout ce qui peu être porteur de valeurs positives, ou plus simplement d’entrain et de joie de ses compatriotes, afin de leur faire oublier l’indigence lamentable de leur propre activité ? Les politiques, bien joué ! On se souvient de la bousculade des membres du gouvernement aux guichets du stade durant la Coupe du Monde, ou plutôt durant la phase finale, supporters de la dernière heure, comme furent leurs ancêtres par l’esprit les résistants de la dernière heure. Aucun de ces savants de la chose publique ne s’était indigné de sa propre confusion entre un divertissement populaire et n’appartenant à aucun parti et les intérêts de son clan, de sa carrière privée.

Par contre, aujourd’hui que deux de nos Bleus choisissent d’offrir des places à des expulsés de Cachan, les mêmes touristes, à faire passer Thierry Roland pour un académicien, se déchaînent contre les gladiateurs qui ont osé agir (au lieu de faire, c’est à dire donner un sens à leurs actes plutôt que de se laisser vivre). Monsieur de Villiers, vicomte, leur reproche de « donner des leçons », ce que le pourfendeur terroristes, qui en voit jusque dans son bol de céréales, ne fait jamais. Il ajoute qu’ils sont faits pour « jouer au foot ». Car il bien connu que dans une démocratie républicaine, il faut être vicomte et producteur de spectacles médiévaux pour pouvoir penser. Monsieur Jégo, vassal du de Nagy Bocsa, pourfend le « grand sportif » qui peut « se révéler un piètre individu sur le terrain de la politique ». On attend toujours la grande innovation politique de ce monsieur Jégo.

Certes, le geste des deux bleus pouvait ne pas susciter une liesse populaire et des acclamations sans fins dans des lendemains qui chantent le printemps de peuples. Au reste, ils n’en demandent certainement pas tant. Tout au plus pouvait-on saluer, avec Bernard Castagnède, le « geste de fraternité et de réconfort ». C’eût été compter sans le sens de la propriété privée qu’ont certains hommes politiques du patrimoine culturel commun. Un Bleu c’est fait pour marquer des buts, à la gloire du Président de la République et de ses amis. C’est là une vision du football et du sport en général à peine plus évoluée que celle du docteur Gœbbels, puisqu’ils substituent à l’encombrante théorie des races la très propre et très efficace théorie des métiers. Au sommet de la pyramide sociale et politique, l’homme politique, si possible inféodé au parti dominant, a seul le pouvoir de s’approprier l’image de tout ce qu’il y a de bon dans le royaume. Si ça marche, c’est grâce à moi, si ça plante, c’est votre faute. Rien que pour la leur montrer, à ces empêcheurs de jouir en rond, ou plutôt en prolétaire, ces Bleus devraient pouvoir s’engager en politique, à leur façon et selon leurs préférences. Il n’est pas certain que ces intellectuels ratés osent affronter ces « piètres individus » sur un ring électoral.

Ces frustrés de l’intelligence politique, laquelle leur a définitivement tourné le dos, ne font que nous convaincre davantage de l’urgence d’une alternance en 2007. La perspective même de devoir endurer cinq années supplémentaires ces comportements d’aristocrates artificiels, ces leçons de directeurs d’école par inaptitude pédagogique, cette dématérialisation constante de la chose politique qui pousse doucement la France vers l’oligarchie par dédain. La « rupture » prônée par ces orfèvres manchots, n’est pas celle d’avec une politique triste et académique, mais d’avec la participation des citoyens au débat. Ils rêvent d’une société où toutes nos attentes leurs sont déléguées, de soixante millions d’adultes sous tutelle politique, qui s’abstiennent bien sagement de dire ou d’agir par eux-mêmes et en conscience, sans en avoir reçu l’assentiment, mieux, l’ordre, de l’autorité politique de tutelle.

A cette ambition vieille comme l’histoire des sociétés humaines, il n’est qu’un remède : mêlons-nous de ce qui les regarde !

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